Vendredi 29 septembre 2006
Cher Francis,
Ce matin en me levant j’ai encore regardé une série de japoniaiseries. En entendant cette langue si familière qui reste pourtant encore si mystérieuse pour moi, j’ai souhaité ardemment arriver à trouver un jour le temps de l’étudier correctement.
Par la suite je suis descendu vers l’ordinateur du bas pour y travailler. Une fois de plus il m’a fallut le démarrer en deux fois vu que ma brave Dellia ne reconnaît plus son disque dur depuis son crash system d’il y a deux mois. Là encore j’ai souhaité très fort avoir le temps un jour d’étudier les profonds mystères des ordinateurs afin d’atteindre un niveau de connaissance matérielles et techniques plus haut que celui que j’ai actuellement.
Puis j’ai du me glisser derrière le volant pour faire des courses afin d’aider ma mère à préparer le repas de demain ( ma sœur fait une visite surprise). Une fois assis sur mon siège j’ai repensé à toutes les économies que je pourrais faire si je connaissais les bases de la mécanique auto.
Arrivé au supermarché, je dois choisir un vin rosé pour accompagner un plat salé sucré. A cet instant j’ai rêvé de connaître le monde des vins et d’avoir la capacité de choisir une bonne bouteille sans me tromper.
Puis en me frayant un chemin vers le territoire mystique interdit des œufs et farines, je réalisais que depuis ce matin je ne faisais qu’espérer acquérir des savoirs aussi nombreux que variés. Je réalisais à ce moment que pour devenir japonais, informaticien, mécanicien et œnologue, il me faudrait bien plus de temps que celui dont je dispose sur ce plan de l’existence. Je repensais au petit bonhomme bleu dans le film des Beatles » Yellow Submarine ». Le nowhere man. Ce petit être hirsute que les membres du groupe découvrent en train de lire des milliers de livres en même temps pour en ingurgiter leur contenu. Je l’entend encore hurler au bord de l’hystérie « so little time, to much to know » Si peu de temps (à vivre) et tant de choses à savoir (à apprendre).
J’entamais donc un travail de deuil de mon ambition d’omniscience. En arrivant dans le rayon DVD je vois un film dont le titre est » un destin inachevé ». C’est bon j’ai compris le message! Je ne serais sans doute jamais quelqu’un capable de parler japonais pour choisir un bon vin après s’être rendu à la propriété avec une voiture réparée par mes soins dans mon garage ou se trouve aussi mon atelier informatique… Je resterai un destin inachevé essayant d’aller le plus loin possible dans mes quêtes multiples de connaissances variées avant que ne surgisse le grand silence.
Je ressassai ces pensées un peu tristes quand une voix me fit lever la tête. Dans ce supermarché bondé de personnes ayant toute eu la même idée de génie que moi, c’est à dire faire ses courses de midi à deux, une femme me demandait à moi de lui décrocher un habit rangé sur un cintre en hauteur. Pourquoi moi ? Il y a tant de gens autour de nous!. Cependant, c’est moi seul que la dame a choisit pour accomplir ce banal exploit ( joli oxymore tiens…). Cela m’arrive très souvent d’être sollicité par des inconnus qui ont aussi le chic pour lier spontanément des conversations avec moi. Je dois avoir une bonne tête qui inspire confiance.
C’est alors qu’une nouvelle révélation prend forme dans mon esprit bancal. Je ne serai jamais omniscient, mon destin sera sans doute banal et inachevé mais mon existence aussi chétive et fugace soit-elle, sera marquée par son indéniable unicité. Je suis un cocktail dégénéré de bonnes intentions, de folie, de forces et de faiblesse. Je ne serai sans doute pas grand chose puisque la peur m’a mené à renoncer à mon destin mais je serai moi. Et là pour être moi, j’ai tout le temps nécessaire…