Archive du dimanche 1er octobre 2006
Cher Francis,
Cette semaine, un enfant que j’ai l’honneur d’accompagner cette année en tant que référent, a prononcé une parole qui m’a chamboulé. Ce jeune garçon de par sa pathologie, vit chaque jour en étant confronté à de grandes craintes. L’une de ces angoisses est de se rendre à une séance bimensuelle de poney. Mon équipe continue de lui proposer cette activité car une fois hissé sur le dos de sa monture, notre ami oublie sa peur et profite de sa séance le cœur léger.
Cette semaine avant de monter sur son poney c’est à dire au moment le plus difficile qui correspond pour lui à un pic d’anxiété, le jeune garçon s’est tournée vers l’accompagnatrice sportive pour lui dire une parole d’une force inhabituelle pour un enfant:
– « Tu sais, j’ai décidé d’être heureux, alors je ne veux plus jamais avoir peur »
Alors en ce mois qui commence j’aimerai moi aussi avoir le courage de suivre la philosophie de ce petit garçon que l’on dit handicapé mental. J’aimerai tant ne plus jamais laisser la crainte s’installer en moi, paralyser ma volonté et mener mes entreprises vers un échec certain…
D’un autre coté, suffit-il vraiment d’oublier la peur pour être heureux? Le jeune garçon a compris que dans son cas ce sont les craintes pathologiques qu’il vit au quotidien qui l’empêchent d’être heureux . Pour nous autres, déclarés sains (on les a bien eu hein ?) La réponse est plus difficile.
Le sentiment de peur que nous éprouvons avant de faire un choix ou de nous lancer dans une entreprise périlleuse, peut parfois en cas de problèmes se révéler rétrospectivement comme ayant été un dernier sursaut de notre raison. Par contre si les choses tournent bien pour nous, dans ce cas nous rangeons la peur dans le tiroir des émotions négatives nuisibles à notre épanouissement.
Cependant, l’unique moyen objectif d’apprécier la légitimité de nos peurs est de réfléchir à leurs raisons d’être et ce, dès que nous les ressentons. Ces émotions existent en nous depuis la nuit des temps car elles sont liées à nos instincts animaux de conservation.
Ainsi suffirait-il pour être heureux de laisser notre raison gérer nos peurs en nous indiquant celles qui sont légitimes et celles qui ne le sont pas?
Cette réponse est vraiment simpliste car au delà des peurs personnelles à court et moyen terme que notre raison parvient à trier, existent des peurs bien plus collectives et effrayantes. Tu sais, ces grandes craintes universelles qui peuvent nous gâcher le plus beau jour de notre vie lorsqu’elles se rappellent à nous… Dès lors, est-il vraiment souhaitable de ne plus avoir peur de la mort qui nous guette? De notre monde qui se meure? De toutes ces menaces qui nous empêchent de croire durablement en un avenir radieux?
Ne plus avoir peur ne signifie pas ignorer ou oublier ces dangers, mais bien au contraire en être conscient tout en ayant assez de force pour les affronter de façon active et philosophique (surtout dans le cas de la mort). Cela revient à remplacer la peur qui paralyse et fait désespérer par la peur qui nous fait prendre conscience des impératifs, des urgences et nous pousse à agir.
Ainsi au bout de cette réflexion dominicale j’en viens à croire que pour être heureux il faut apprendre à espérer tout en se battant chaque jour pour nos idéaux.
Je désire être heureux et pour cela j’ai décidé de tenter de maîtriser mes peurs.