Certaines personnes naissent avec des vraies aptitudes pour la musique, d’autres comme moi viennent au monde avec un fort attrait pour cette forme d’art mais sans avoir de prédispositions pouvant faciliter les apprentissages.
D’aussi loin que je m’en souviens, j’ai grandi dans une maison où la musique était omniprésente et même si mon père ouvrier n’a pu s’acheter sa première chaine hifi que quelques mois avant sa mort, cela n’empêchait pas mon frère de passer en boucle de très bons albums sur cassettes et vinyles.
Du coup vers mes dix ans au lieu d’aller jouer avec les autres enfants et de faire les bêtises ordinaires de gamins qui vont bien, j’étais souvent couché sur une couverture dans la pelouse à écouter un album de Pink Floyd sur un magnétophone branché avec une rallonge.
Comme tant de gamins après avoir écouté certains concerts, j’ai cassé les pieds de mes parents pour qu’ils m’achètent une flute avec laquelle je n’ai jamais joué faute de savoir comment m’en servir. D’autres instruments du même genre sont ainsi entré et ressortis de ma vie de façon très rapide. 😆
Puis arriva le temps du collège, la découverte de l’anglais en sixième et de réelles difficultés à investir cet apprentissage jusqu’ici inédit : l’apprentissage peu motivant d’une langue étrangère. Et c’est là que la musique accompagnées d’une série de faits trop invraisemblables pour être qualifiés de coïncidences vint à mon secours.
Un soir alors que ma mère était à une réunion de caté, mon père qui voulait toujours me faire écouter sa musique me demanda de rester avec lui pour regarder les enfants du rock, c’était une émission sur les Beatles avec en point d’orgue la diffusion du dessin anime long métrage « Yellow submarine » Pour moi ce fut une révélation, voire une révolution dans ma vie car mon intérêt pour ces mélodies et cet univers bariolé se transformèrent en une quête féroce qui dura plus de dix ans. Mon but était simple, je voulais trouver toutes les chansons des Beatles et maitriser leur langue.
Quelques mois plus tard mon frère me fit sans doute le plus beau cadeau que l’on puisse faire à un enfant, un vinyle premier pressage du premier album des Beatles tout gribouillé au crayon et un song book avec des tablatures. Mon intérêt pour les Beatles et l’anglais décolla avec l’achat de ma première guitare, achetée à mon coiffeur pour 50 francs. C’est avec cette petite guitare classique que je découvris les accords avant d’inventer des rythmiques et des mauvaises façons de jouer qui aujourd’hui encore sont ancrées si profondément qu’elles freinent mes apprentissages à la guitare et à la basse. 😈
Mais qu’importe, jouer des chansons simples, chanter les chansons, travailler mon oreille ma mémoire, tout cela grâce à la musique firent de moi un très bon élève du cours d’anglais et au delà de cela me permirent d’atteindre un niveau qu’aujourd’hui encore je pense être proche du niveau anglais courant.
Ce fut le premier don que je reçu de la musique.
Bien plus tard pendant l’épreuve du confinement et ma panique suite à une grosse bronchite qui faute de tests à l’époque me fit craindre le pire, je traversais des heures très ombres hantées par de noires pensées auto destructrices. Et là encore lorsque n’arrivant pas à dormir je me relevais à 3h00 du matin, je prenais une guitare et je composais des petits morceaux de musique qui me calmaient. Sans vouloir trop exagérer je pense pouvoir dire qu’à cette époque de solitude et de terreur, la musique fit plus que calmer mes nerfs mais m’évita de faire le pire.
Alors vu que le second don de la musique fut de me sauver la vie, j’avais décidé de la mettre au centre de ma vie en reprenant des cours de guitare puis de basse, instrument que j’avais toujours aimé dans les morceaux que j’écoutais.
Au bout d’un an constatant que les méthodes pédagogiques de mon prof de guitare ne me convenaient pas, je décidais de me focaliser sur la basse, et depuis je m’accroche encouragé par quelques progrès.
Et c’est là que la musique qui ne cesse de couler en moi me parla pour la troisième fois pour m’annoncer qu’elle m’accordait un troisième don, sans doute le plus beau de tous, celui de me donner l’envie de la partager en montant des projets musicaux avec les enfants au travail. Là encore comme par hasard (ben voyons) je me retrouve en équipe avec une enseignante qui aime beaucoup la musique et ça ce n’est pas nouveau mais aussi et là c’est énorme, avec une éducatrice qui m’annonce qu’elle est chanteuse dans un groupe ! Alors fort de mes petits progrès comment résister à l’envie de partager cette passion avec les enfants et de vivre des moments merveilleux avec eux.
Voir la grande du groupe qui est souvent en échec s’intéresser à la basse que je lui ai mis dans les mains et après quelques mois réussir à jouer la ligne de basse qui est la colonne vertébrale de notre chanson que nous allons présenter en concert le 6 juillet. La voir courir avec sa basse et appeler les adultes pour leur montrer avec fierté qu’elle arrive à jouer cette mélodie bien connue (seven nation army des white stripes). Puis découvrir chez un de nos jeunes garçons de réelles aptitudes pour la musique qui lui permettent d’apprendre la même chose que la grande en trois fois moins de temps. Et après quelques semaines de travail, les entendre jouer ensemble et les voir s’émerveiller en comprenant qu’ils ont atteint un stade très important dans leurs apprentissages de musiciens.
Et tous ces moments comiquement absurdes comme hier lorsque le jeune garçon qui maintenant préfère prendre sa guitare au lieu de jouer aux legos vient vers moi pour que je lui apprenne d’autres choses et lui faire écouter « Smoke on the water » de Deep Purple et voir ses yeux briller lorsque je lui annonce qu’il la jouera sur scène pour le spectacle de Noël.
Tout cela et ce qui va suivre forment sans doute ce que la musique a de mieux a offrir à une personne; lui donner la chance de la faire découvrir à d’autres en vivant d’intenses moments de joie, comprendre que pour aller plus loin on ne peut travailler seul, trouver d’autres personnes et travailler avec elles pour monter des projets, bref, offrir et recevoir pour le plus grand bien de tous les acteurs du projet enfants comme adultes.
C’est ce troisième don que m’a fait la musique qui fait que je suis si heureux d’aller travailler tous les jours car lorsque j’arrive dans notre salle éducative, je contemple à coté du grand tableau notre armoire pleines d’instruments qui me rappelle que pour les enfants que nous accompagnons, la musique est devenue dans le cadre d’un réel apprentissage, un vrai support de progression, de valorisation et d’épanouissement.
Du coup en écrivant ces lignes je me rends compte que la musique en plus de m’apprendre l’anglais, de m’avoir sauvé la vie et de s’être mise au service de mon métier, m’a aussi permis de m’ouvrir encore un peu plus aux autres avec les cours et les conseils que je recherche pour mes projets et m’a surtout apporté un réel sentiment sans cesse renouvelé de bonheur.
Alors toi qui me lis, c’est quand que tu t’y mets à la musique ? Mais réfléchis bien avant de le faire, la musique quand elle nous parle peut bouleverser nos vies !