Me revoici devant mon ordinateur sous l’escalier près de la caisse du chat. Oui la pièce où je travaille est toujours en travaux et vu que je suis le seul ouvrier resté sur le chantier, les retards s’accumulent. A ma décharge il faut tout de même préciser qu’un ouvrier n’a pas à faire la cuisine, le ménage , les courses, les lessives et les trajets chez le kiné
Je suis donc bien en retard mais je ne désespère pas d’y arriver. C’est vrai que les gens normaux ont des amis pour les aider, moi je n’en ai pas, du moins pas du genre de ceux à qui je pourrais faire cette demande.
Du coup je n’ai pas d’autres solutions que de travailler plus longtemps et si il le faut pendant la nuit. Pour être sûr de retrouver une maison rangée je me suis fixé des délais. Aujourd’hui mardi je dois aller chercher le papier peint et jeudi je dois commencer de retapisser. Je dois aussi trouver une autre armoire plus grande pour ranger les appareils photo qui me reste, mais ça c’est un autre problème qui n’est pas prioritaire. Non par pitié tout sauf taper un autre message dans ces effluves ammoniaquées d’urine de vieux chat aux reins bousillés.
Dans cette maison tout est foutu et en décomposition, moi y compris. C’est donc un Halloween perpétuel, dommage qu’il fasse trop peur aux enfants qui cette année encore ne sont pas venus sonner à ma porte. Je n’aurai jamais cru me sentir à ce point seul et méprisé par cette absence. Bref je vais bientôt arrêter de taper car sinon mes doigts vont une fois de plus m’entrainer vers mon coté sombre et déprimé.
Mais en dépit du passage à l’heure d’hiver qui voit le triomphe des ténèbres et ce contexte aussi morbide qu’inquiétant, je reste relativement serein car les ténèbres je les connais bien et parce que la vie m’apporte parfois des petites consolations comme par exemple les sorties au pub avec ma voisine d’en face, les coup de main du copain qui m’a aidé par exemple à changer mes roues et bien sûr quelques cartes pokemon achetées pour avancer dans ma collection. Que cela soit du superflu, de l’illusoire ou du vital comme les liens sociaux, je mets tout cela dans le même sac, celui des choses qui me font tenir et espérer.
En espagnol, le verbe « esperar » est un faux ami qui veut dire attendre, j’ai toujours aimé cela car finalement l’espérance ce n’est que cela, de l’attente, de la foi certes, mais surtout de l’attente. Du coup je suis là dans mon bordel innommable en train de chercher comment m’organiser au mieux tout en espérant le retour de la lumière. 😎